Salut à tous,
Vendredi de la semaine dernière a été une journée de vol incroyable à Chaudefonds. D’après Philippe DUPONT, qui fréquente le site depuis 40 ans, c’est du jamais vu en décembre ! Vous avez peut-être admiré les photos dans la rubrique dédiée.
Nous étions nombreux pour cette période mais il y avait de la place pour tout le monde. Tenir en l’air et enrouler étaient évident. Soleil, bonne ambiance, vol à volonté, ce fut une super journée … mais on a frôlé le drame, j’ai bien failli tout gâché.
Je vous fais alors un debrief pour qu’il serve de piqure de rappel aux vieux pilotes et de sensibilisation pour les plus jeunes.
La journée s’annonce effectivement sympa, il y a déjà du monde en l’air et au déco lorsque j’arrive vers 12h30. C’est encore un poil travers droit mais ça semble pas trop mal et se réaligner.
Excès de confiance et précipitation
Je suis à domicile à Chaudefonds, je connais par cœur, c’est la dernière de l’année, ce n’est pas souvent que ça vole comme ça (surtout l'hiver) et je reprends le boulot en début d’aprèm, alors il n’y a pas de temps à perdre. Pour une fois, je n’analyse pas plus que ça les conditions, il y a déjà des fusibles en l’air. Pourtant, je devrais voir que les pilotes (y compris à côté de moi en gonflage) ont besoin de tenir leurs ailes. J’aurais dû entendre : « ça bouge quand même » et considérer cette remarque.
Que dalle ! Je déplie sans attendre, saute dans ma sellette comme dans mon slip le matin quand je me réveille à la bourre, gonfle et décolle tout de suite. Ce que je ne fais jamais, d’habitude je reste un peu au sol, l’aile au-dessus, pour sentir un minimum la masse d’air.
Erreur de jugement
Là, tout s’enchaine en moins de 30 sec. Je vire à droite, monte directement au-dessus de la crête, je me dis que je vais pouvoir sans problème rejoindre les 3 seuls pilotes en l’air qui sont en train d’enrouler au-dessus de la combe. Et puis non puisqu’immédiatement, entre les deux décos, je croise un thermique nickel. Je préfère l’exploiter, il ne sera rien qu’à moi, on ne se gênera pas à 4 dans la combe. Main droite pour commencer à tourner dedans. ¼ de tour (face à l’atterro) ça monte incroyable et là … mauvaise décision !
J’aurais dû commencer par des 8 pépères mais je présume (la pente est dans mon dos) que je dois être assez haut pour pouvoir enrouler directement, avec la marge nécessaire. La pompe est étroite alors je visse. ¼ de tour supplémentaire (face à Chaudefonds), mon aile ferme sérieusement à droite. Pas le temps de comprendre, je bascule côté droit, je perds immédiatement la "pseudo-marge" et me retrouve face à la pente (juste avant le déco, à hauteur de la haie, rocher sur ma gauche).
Défaut de pilotage
J’ai pourtant déjà mentalisé plein de fois la réaction à avoir en cas de fermeture, j’ai lu de multiples articles sur le sujet, je l’ai déjà fait en stage (mais il y a 20 ans), je pense que je saurais gérer avec suffisamment de gaz, mais réagir en une fraction de seconde, sans panique ni sidération, avec les gestes justes, il n’y a pas à tortiller, faut y être entrainer pour que ce soit ancrer et que ça devienne réflexe.
Presque face à la pente, aile en vrac à droite, le retour au sol est inévitable. Je contre fort à la commande à gauche, pour au moins tangenter le plus possible le relief sous le déco lors du contact. Pas le temps ni le réflexe de me redresser dans la sellette. Le problème est que j’oublie complètement ma main droite qui reste basse depuis tout à l’heure, peut-être même qu’elle l’est davantage. La demi-aile correspondant ne vole plus. Les deux mains étant trop basses, l’aile amorce probablement un décro, je bascule en arrière dans ma sellette.
Ça se termine par une chute de 5 à 10 m avec impact à plat sur le dos. J’ai énormément de chance :
- Je n’ai absolument rien. Merci l’airbag ! Je peux maintenant vous certifier que c’est impressionnant d’efficacité même s’il ne vaut mieux pas tester, en tout cas pas avec plus de violence. Je m’attendais au-moins à avoir des courbatures le lendemain mais rien du tout !
- La pente a probablement adouci le choc.
- L’aile n’a rien. Elle est délicatement étalée derrière moi sur les fougères. Elle n’est pas dans un arbre, je ne récupèrerai donc pas le trophée du bucheron de Marion.
La suite
Marco et David, présents au déco, se sont précipités pour s’assurer que tout aille bien. Ils m’ont aidé à défaire l’aile des quelques ronces et à la remonter. Un grand merci à eux. Marco, qui a vu la fin du sketch m’a confirmé la mauvaise gestuelle.Le débrief ayant confirmé les erreurs évidentes, n’ayant pas de bobo, les conditions semblant encore meilleures (vent devenu bien de face, pas trop rafaleux), les ailes en l’air étant bien étagées et ayant conservé ma motivation, je décide de raccrocher l’aile dans la foulée.
Je gonfle, je prends cette fois-ci le temps de jouer un peu au sol pour tester, j’attends la petite bouffe qui va bien et hop … c’est reparti. La suite est magique pour un mois de décembre. On est nombreux en l’air mais ça monte un peu partout donc on est suffisamment espacés. Il y en a pour tout le monde. On peut jouer à plusieurs dans les mêmes pompes, enrouler en se décalant derrière le déco, revenir, reposer, redécoller … Que du bonheur !
Bilan
- Nos petits sites nous offrent des journées de vol magiques et parfois faciles. Quels que soient son niveau et son expérience, on peut y voler sans danger à condition de respecter des règles de base. À Chaudefonds, le déco est assez évident, l’atterro gigantesque. Par conditions calmes, les débutants peuvent y faire des ploufs sans souci puis, avec l’habitude et les conseils des anciens, faire leurs 1ers vols de durée et apprendre la repose au déco. Les plus aguerris peuvent jouer avec les thermiques et connaitre le bonheur de s’extraire, à condition de ne pas cumuler les risques comme je l’ai fait.
- Pour devenir (puis rester) un vieux pilote, il faut entre autres apprendre les bons gestes en stage puis s’entrainer régulièrement pour les conserver. Dans le cas présent, ça aurait été mieux mais probablement pas suffisant par manque de temps et de distance par rapport au relief. La priorité est donc la marge. Près du sol, on a encore moins le droit à l’erreur.
- Enfin, il faut gagner en confiance en soi et dans son pilotage pour franchir les paliers de la progression mais également continuer à régulièrement se remettre en question pour ne pas tomber dans la facilité, les mauvaises habitudes, une routine sans analyse …
Hier s’annonçait potentiellement similaire. On s’est retrouvés plus ou moins les mêmes à Chaudefonds. Les pilotes arrivés tôt ont pu voler un peu mais ce n’était pas aussi bien. Les deux mois à venir seront moins propices mais il y aura tout de même des créneaux pour voler et gonfler. Alors continuez à aérer vos ailes pour ne pas rouiller.
A bientôt, à Chaudefonds ou ailleurs.
Alex